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vendredi 30 novembre 2012

De Kavala à Alexandroupolis - En chantant a travers la Thrace




Nous continuons notre traversée du nord-est de la Grèce sous un ciel radieux et un air relativement doux pour la saison. Ces régions très peu touristiques ont la particularité d'être principalement peuplée par des grecs de confession musulmane. Des minarets pointent dans les villages disséminés dans la campagne et révèlent une facette de la Grèce que nous ne soupçonnions pas.
Bien que le paysage soit joli, les routes que nous suivons sont droites, longues et monotones alors on en profite pour apprendre des chansons qui constituent maintenant notre juke-box du voyage. On a à notre actif quelques Gainsbourg, un Barbara, une pincé de Johnny Cash, des Stones, du Brassens, du Piaf, un Bourvıl et même « l'indépendantiste du 14ème arrondissement» de Renaud qui nous a été inspiré par notre traversée de l'ex-yougoslavie.

Alors que Benjamin commence à désespérer de marcher sur une route qui semble longer à l'infini l'autoroute qui mène en Turquie, un panneau nous indique la via Egnatia, ancienne voie romaine qui menait alors à Byzance (aujourd'hui Konstantinoupolis pour les Grecs et Istambul pour les autres). On va la suivre sur une vingtaine de bornes, ce qui nous permet de nous plonger dans un environnement naturel qu'on ne fait que deviner en restant sur la route. Ca fait du bien aux pieds et au moral de fouler des petits chemins d'autant plus que la lumiere est sublime. On se paume un peu, on avance a ''visto de nas'', on retrouve notre chemın, une source providentielle, puis la route qui nous mene a Alexandroupolis. Nous approchons une nouvelle fois de la côte Égéenne. Au loin, surgit de la brume dans laquelle la mer se dissipe, l'impressionante silhouette fantomatique de l' île de Samothrace qui culmine à plus de 1600m.

On ne pensait pas y arriver et pourtant on dirait bien qu'on s'approche du bout de la Grèce. En arrivant a Alexandroupolis, qui nous semblait il y a encore quelques semaines un but bıen lointain, un panneau nous annonce que Konstantınopoulis n'est plus qu'a 297kms... qui, malheureusement pour nous, n'offrent pas d'autres alternatives qu'une voie express ou circulent d'enormes camions...

lundi 19 novembre 2012

De Kerkini à Kavala - Une nuit dans un 33 tonnes



Nous quittons a reculons notre chaleureuse petite auberge pour longer le lac de Kerkini en direction d'Hiraklia. La compagnie de nombreux volatiles: pelicans, herons et flamands roses nous remotive. Les pelicans tout particulierement, dont nous observons attentivement la technique de peche, nous amusent beaucoup. Ils avalent tout rond une quantité industrielle de petits poissons et ressortent de l'eau la tignasse en petard.
Les jours qui suivent nous traversons une campagne vallonnée, tres exploitée. Principalement des champs de coton, des vignes et des vergers d'oliviers dans lesquels nous choisissons souvent d'installer la tente. L' automne étant maintenant bien avancé, la plupart des champs sont labourés ce qui donne au paysages de subtiles dégradés de teintes marron-ocre crème brûlée. La campagne grecque nous semble bien moderne en comparaison de celles que nous avons traversée dans les balkans. Les tracteurs trimbalent tout un tas d'engins aux fonctions bien déterminées, les meules de foin sont faites par des machines et bien sur fini les carrioles tractées par des ânes. De même, nous avions un peu oublié ce que pouvait être de véritables zones commerciales et restons assez effarés devant le besoin impérieux qui pousse les gens à consommer tout un tas de trucs rarement fondamentaux (...et de nous demander par la suite comment on fait pour se payer un pareil voyage...). Ce matin pourtant, le gouvernement grec vient de voter un nouveau budget d'austerite.

Pour le plus grand bonheur des yeux et des papilles les branches des plaqueminiers s'affaissent sous le poids d'enormes kakis couleurs braises tandis que la peau sèche des grenades craque et explose litteralement sous la pression de gros pepins rubis gorges de sucre et d'eau. Toutes ces vitamines tombent à point, nous sommes tous les deux enrhumés et bien fatigués depuis notre entrée en Grèce. Les journées sont courtes et si nous voulons maintenir nos 25kms quotidiens nous ne pouvons nous accorder trop de pauses. Nous déclinons a regret les quelques invitations qui nous sont faites d'aller boire un café.

Et si dans la plaine italienne en tenue de randonneur nous faisions figure d'extraterrestres, ici, avec nos blousons, gants, bonnets et batons, nous avons l'air de deux skieurs égarés a quelques km de la côte. Sur notre passage dans les villages, les Grecs crient : touristes ! touristes! et quand ils apprennent qu'on est francais ils nous parlent de Sarkozy/Hollande.

En vracs, quelques caractéristiques notables depuis notre entrée sur le territoire hellénique : De tres jolis decors peints ornent le contours des fenêtres de maisons au plan carré sobres et élégantes, les pâtisseries sont parfumées a la fleur d'oranger et a la cardamome, de nombreux vendeurs ambulants parcourent les campagnes avec des camionnettes équipées de haut-parleurs nasillards, les grecs ont souvent dans la main un chapelet qu'ils tripotent de maniere machinale, et les camionneurs ont régulièrement, plantées au milieu de leur pare-brise, d'enormes croix orthodoxes clignotantes (du plus bel effet...). Ce qui reste cependant le plus déroutant pour nous en Grèce est la facon qu'ont les gens de dire oui ou non. Le ne (oui en grec) s'accompagne d'une inclinaison de la tête sur le coté tandis que pour dire non (ochi), les gens lèvent très lentement les yeux au ciel. Nous restons souvent interloqués tant ces mots et ces gestes sèment la confusion dans l'esprit d'un francais.

C'est également dans la plus grande confusion que nous rencontrons la famille Etamos. A la sortie du petit village d'Antifilippi, nous faisons le plein en eau en vue de se cuisiner des pâtes. En cassant des branches pour préparer notre feu, nous déclenchons les aboiement d'un gros chien, gardien d'un entrepot grillage qui nous surplombe. Rapidement, l'alerte est donnée, un homme à la voix de baryton arrive, nous pointe avec sa lampe torche et nous questionne en grec. Il est à une dizaine de mètres au dessus de nous, derrière un grillage, dans l'obscurité nous sommes éblouis par sa lampe. La communication est quasiment impossible, il s'en va et revient quelques minutes plus tard avec sa fille qui touche quelques mots d'anglais. Elle nous demande de faire le tour pour les rejoindre. On s'exécute. Le monsieur, sa fille et sa femme nous conduisent près d'un énorme camion volvo. Nous ne comprenons pas vraiment où ils veulent en venir, jusqu'au moment où ils ouvrent la porte, allument la lumière et nous désignent deux couchettes. On éclate de rire, la situation est cocasse, nous allons passer la nuit dans la cabine d un poids lourd, sur le parking d'une entreprise de distribution de nourriture pour animaux. Ça nous convient parfaitement, l'engin est isolé et nous aurons moins froid que dans la tente.
Une heure plus tard, un camion se gare à côté du nôtre, c'est le fils de Christos et Katarina Etamos. Il nous invite un boire un coup, il est très amusé de nous trouver là, d' autant plus qu'il nous a déjà croisé deux fois sur la route. Il nous prend pour des fous et ne comprend vraiment pas pourquoi on fait tout ce trajet à pied. On lui fait remarquer que sans cela nous ne l'aurions pas rencontré. C'est désormais notre traditionnelle réponse, la seule qui met à chaque fois tout le monde d'accord. Ca ne l' empêche pas de nous dire « si un jour ma fille m'annonce qu'elle fait un truc pareil, je la zigouille.» On en vient à parler du modèle familial grecs, de la nécessité pour l'homme d'entretenir sa femme..., de l'importance de rester proche de ses parents ( depuis notre entrée dans le pays, plusieurs nous ont déjà demandé comment nous vivions la séparation avec nos parents....).  Bref c'est un modèle patriarcale traditionnel, un peu comme on l'a vu dans les balkans, à la différence qu'ici les femmes sont quand même invitées dans les conversations (après avoir tout de même préparé le café !). Cela reste certainement plus valable dans les zones rurales que nous traversons plutôt que dans les grandes villes.

On reprend la route un peu dans le jus, Benjamin à un rhume et cette semaine dans la pampa grecque nous a bien épuisé. on finit par arriver à Kavala via un ancien chemin de mules comme on en avait plus vu depuis l'Italie. Un vieux, hilare de savoir que nous venons de France à pied nous dit qu'il date de Megalou Alexandrou.

dimanche 11 novembre 2012

De Skopje (Macedoine) à Kerkini (Grece) - Euphorie hippie



Skopje est une ville extrêmement mal fichue pour les piétons mais a le mérite d'abriter un veritable bazar ou il est encore possible de trouver quelques trésors. Le tourisme n'en étant pour le moment qu'a ses balbutiements, pas de boutiques de faux bibelots balkaniques fabriques a Taiwan. On s'offre un petit tissu et Benjamin une chemise aux motifs traditionnels macedoniens. Il faut dire qu'après avoir visite la fantastique collection de vetements du musee ethnologique on est un peu eblouis par la richesse des influences et la variete que l'on trouve dans les textiles de la region.
Pour quitter Skopje nous sommes contraints de prendre un bus, en effet, il n'y a pas d'alternative aux 50km d'autoroute qui nous separent de la ville suivante. On a bien fait car seulement deux jours plus tard, a l'occasion de l'anniversaire de Tleytmess, on s'offre une bonne quinzaine de bornes sur la bande d'arret d'urgence de cette meme autoroute pour cause de route secondaire introuvable. Heureusement, c'est dimanche, il n'y a personne, a part un automobiliste debordant d'enthousiasme qui s'arrete au beau milieu de la double voie pour nous offrir de succulentes grenades, du raisin et de l'ail que Benjamin gobera illico presto en vue de tenter de remedier a de nouveaux problemes gastriques (il parait que ca desinfecte ...).

A Demir Kapija, alors que nous desesperons de trouver une chambre, Aaron, volontaire americain pour la municipalite nous tombe dessus et nous indique un super plan logement crado-deglingue pour pas un rond. Heureusement, car avec le vent qu'il fait, la tente ce serait probablement envolee. Autour d'une gigantesque et delicieuse salade (En Macedoine, meme les hommes les plus corpulents se nourrissent de kilos de verdure), Aaron nous explique ses projets pour developper le tourisme a Demir Kapija dont l'environnement naturel est propice a tout un tas d'activites sportives. Sa femme, Lori, quant a elle, enseigne l'anglais a l'ecole du village. Ils sont tous les deux très sympathiques et portent un intérêt sincère à la culture balkanique et macédonienne en particulier. Slave, un de leurs amis macédoniens, se joint à nous, il est passionné d' archéologie et d' histoire et connaît quelques anecdotes croustillantes : il y a quelques années des paysans macédoniens trouvent dans leur champ une caisse pleine de bouteilles de cognac oubliée par des soldats français lors de la première guerre mondiale. Rapidement la nouvelle se répand dans le milieux des spiritueux. Quand des collectionneurs fetichistes tentent de racheter le butin à prix d'or, les villageois ont déjà tout bu.  Dans les balkans l'alcool ne se collectionne pas, il se boit !

Par ailleurs Slave fait de la randonnée et connaît bien les chemins de la region sur lesquels on espère qu'il nous conduira peut etre un jour. Nous lui indiquons notre prochaine etape, ca tombe bien il a un ami a Udovo qui pourrait nous aider à trouver un hébergement pour la nuit. Trajce possède une exploitation agricole et nous propose de dormir dans une petite cabane qui nous convient parfaitement. Il nous offre un bon morceau de fromage et un énorme pot d'Ajvar (spécialité balkanique que chaque nation énonce comme lui étant propre, c'est une sorte de puree a base de poivrons et d'aubergines). Il nous parle des conditions de vie difficiles des macédoniens dont nous nous sommes fait une idee en traversant les campagnes. Le materiel agricole est sommaire voire totalement vetuste. La vie est rude et le travail de la terre se fait a l'ancienne. On croise souvent le long des routes des attelages ou de petites carrioles tirees par des anes malingres. A la difference des autres pays de l'ex-yougoslavie, la Macedoine reste tres isolee sur le plan economique et geographique, entourée de pays avec lesquels les relations ne sont pas très cordiales, voire franchement mauvaises, comme avec la Grèce qui ne reconnaît pas le nom de «macédoine». Depuis notre entree dans ce pays les gens nous évoquent aussi des accrochages reguliers et une tension palpable avec la population albanaise fortement présente dans le nord-ouest du pays, en particulier depuis la guerre au Kosovo (250 000 albanais du Kosovo ont trouve refuge en Macedoine, un certain nombre d'entre eux sont restes).

En route vers la Grèce nous tombons sur une joyeuse bande de cyclistes hippies : une ''rainbow caravane'' qui réunit une dizaine de ''zozos'' toutes nationalités confondues. Partis de Slovaquie, a l'occasion d'un grand rassemblement ''arc en ciel'', il se rendent en Israël. Dans la droite ligne du mouvement hippie la communaute raimbow est autosuffisante et partage des valeurs de tolerance et de decroissance. Ils ont eu l'autorisation d'installer leur campement pour quelques jours dans un splendide verger de grenadiers et nous invitent à les rejoindre. Nous partageons avec plaisir les 2kg d'Ajvar offerts part Trajce qui commencaient a peser lourd dans le sac de Benjamin. On profite ainsi d'une soirée feu de camp accompagnée d'un répertoire de chants d'amour de paix et de liberte. Ils nous concoctent une tambouille roborative dont nous avons bien besoin depuis deux jours qu'on ne se nourrissait que de pain et de fromages parfois douteux (les epiceries locales ne sont pas folichonnes). Alors que nous doutions un peu de notre capacité à continuer notre périple pédestre jusqu'à Istambul -les journées sont de plus en plus courtes et les nuits de plus en plus froides- la rencontre avec la tribu «rainbow» (et un coup d'oeil sur la météo des semaines à venir ) nous redonne confiance. Ca n'empêchera pas Tleytmess de choper un rhume qui nous oblige à faire une pause au chaud dans un pension grecque bien chaleureuse sur les rives du lac Kerkini ou nous pouvons tranquillement observer les pelicans que nous avions manque au Lac Skadar (Montenegro/Albanie).

samedi 10 novembre 2012

Un petit quelque chose pour les oreilles II


Dans l'immense maison ou nous sommes accueillis a Thet, en Albanie, nous nous rechauffons pres du feu ou deux dames discutent :


Alors que nous nous promenons sur la muraille qui surplombe la ville de Prizren (Kosovo), et qu'une pluie legere tombe, les muezzins de toutes les mosquee de la ville retentissent dans une effrayante cacophonie :


Dans un restaurant de Gjakova (Kosovo) passe de la musique traditionnelle albanaise. Il s'agit de Shkelzen Jetishi Xeni & Zejnel Doli. On avait trouvé un merveilleux clip tourné a Gjakova, malheureusement la vidéo n'est plus disponible.

A l'excellente auberge Shanti à Skopje, le réceptionniste écoute un groupe serbe un poil funky-deglingos, Kanda, Kodza i Nebojsa :

jeudi 1 novembre 2012

de Bajram Curry (Albanie) à Skopje (Macedoine) - Traversée du Kosovo



Nous quittons Bajram Curry et l'Albanie dans une drôle d'ambiance. Nous suivons une route défoncée qui traverse des champs jonchés d'ordures, la brume s'est installée dans la vallée, et ponctuellement, apparaissent des meutes fantomatiques de chiens errants. nous nous apprêtons à entrer  au Kosovo avec en tête le message qu'un jeune kosovar, élève d'une classe de Pau avec laquelle nous correspondons, nous a écrit : « là bas il y a de la neige qui tombe et il fait très froid. Et il ne faut faire confiance à personne. Il n’y a pas de sécurité. Il ne faut pas dormir n’importe où parce que il y a des chiens dans la rue sans leur maître. Aussi il faut faire attention dans la forêt parce que il y a des ours et des loups. Quand tu passeras mon pays peux tu me garder un peu de neige ? »
Histoire de compléter ce tableau enthousiasmant, la campagne albanaise est truffée de bunkers plus ou moins dégradés. ceux-ci ont été construits pendant la dictature communiste dans un grand délire paranoïaque d'Enver Hoxha, persuadé que tout le monde voulait envahir l'Albanie. Il y en a plus de 750000 à travers tout le pays, soit 1 bunker pour 4 albanais. Leur construction a coûté une fortune. Aujourd'hui, «les champignons de tonton Hoxha» font partie du patrimoine et certains sont réhabilités en lieu de stockage, bar, hôtel...

Notre courte traversée du sud kosovar nous donne l'occasion de decouvrir 2 villes qui nous ont bien plu. Gjakova et son immense bazar que nous visiterons dans le plus grand calme pour cause de jour férié : c'est Bajram (Aïd el kebir dans les balkans). Gjakova possède de très belles maisons de style ottoman, ainsi qu'une élégante mosquée devant laquelle traîne une ribambelle de gamins. Ils nous ont vu la veille lorsque nous avons traversé leur quartier, sorte de bidonville aux abords de Gjakova, quelques visages nous sont familiers. Nous avançons sous le porche de la mosquée où sont entreposées des peaux de moutons sanguinolentes, résultat des sacrifices de la veille. Un jeune homme nous explique qu'elles serviront à confectionner des tambours. Les enfants nous entourent, nous posent tout un tas de questions. Bien que leur vie soit de toute évidence assez modeste, nous ne sommes pour eux, ni portefeuille ambulant, ni bête de foire, mais amis, ce qui rend l'échange bien agréable.
A Prizren nous prenons le temps de faire un tour dans la ville qui regorge de bâtiments historiques: églises catholiques ou orthodoxes, mosquées, bains, maisons traditionnelles, fortifications. Nous y dormons dans un hôtel bon marché, city hostel. Le patron est curieux et avenant et nous discutons un bon moment avec lui, entre autre de la situation du pays.
Le Kosovo est peuplé à 80% d'Albanais, pour la plupart musulmans. La situation au nord du pays est encore tendue, la Serbie n'ayant toujours pas reconnu son indépendance. Un certain nombre de Serbes vivent sur le territoire, au nord, mais aussi dans des enclaves disséminées dont une que nous traversons au sud. C'est un épicier qui nous met la puce à l'oreille en s'adressant à nous en serbe. Il est très intéressé par la petite cloche que Benjamin a attaché sur son sac depuis la Slovenie pour prévenir les animaux, les ours en particuliers, de notre présence. Il est aussi berger et en aurait bien besoin pour l'une de ses bêtes. on lui offre de bon coeur, pour une fois qu'on peut faire un cadeau utile !
Quelques km plus loin, à Brezovica, on mange dans une petite auberge en présence de militaires américains de la Kfor (force armée de l'ONU chargée de maintenir la paix au Kosovo). Les types causent base-ball et littérature de guerre dans un américain chewing-gum du plus bel effet. Quant à nous, lorsque, par réflexe, nous employons notre faible vocabulaire albanais, le serveur nous fait gentiment comprendre qu'ici et dans la petite ville d'après il vaut mieux s'exprimer en serbe, autrement dit, pour ne vexer personne et en jargon de linguiste, en BCMS (bosniaque, croate, macedonnien montenegrin, serbe, slovène). ça nous arrange, depuis deux mois qu'on le baragouine on le maîtrise bien mieux que l'albanais que nous tentons de pratiquer depuis 15 jours seulement.
Différents indices permettent au marcheur de savoir s' il est dans une enclave serbe: la présence d'églises orthodoxes, de drapeaux, de plaques minéralogiques, de croix orthodoxes aux rétroviseurs des voitures et quelques graffitis du genre «Kosovo is Serbia».

La nuit tombée, vers 5h (foutu changement d' heure) nous arrivons à Brod, un petit village dont on ne sait s'il est peuplé de serbes ou d'albanais (aucun indice flagrant). Un peu hésitants, on se décide a frapper à la porte d'une maison pour demander l'autorisation de camper dans le champ voisin (en anglais c'est plus prudent...). Un jeune homme nous ouvre, accompagné d'une petite fille. Il envoie celle-ci chercher un monsieur et une dame suivis d'un petit garçon, puis d'une femme portant un bébé. Tout ce petit monde s'agite sur le perron, on saisi au vol quelques mots d'albanais et on comprend qu'ils n'ont aucunement l'intention de nous laisser dormir dans la tente avec le froid qu'il fait. En deux temps trois mouvements l'intégralité de la famille nous escorte dans une maison annexe dans laquelle nous sommes invités à dîner et à dormir. Depuis le début de notre périple, on reste épaté par la manière et la rapidité avec laquelle les gens qui nous offrent l' hospitalité interrompent leurs activités pour se mettre à notre entière disposition. Après un délicieux dîner c'est à nouveau suivi du cortège familial que nous allons sur internet pour discuter via msn avec Hesat, leur fils qui a une trentaine d'années. Il s'est installé en France pendant la guerre alors que ses parents sont restés cachés dans leur maison brûlée par l'armée serbe. Puis, à la fin du conflit, son père s'est chargé lui-même de déminer, sans le moindre équipement, le champ autour de chez lui. cela ne l'empêche pas aujourd'hui d'avoir en continue le sourire aux lèvres et de dégager, lui et sa femme, quelque chose de très chaleureux et jovial que nous avons profondément apprécié.

A la frontière macédonienne, nous nous retournons pour dire au-revoir au Kosovo, une neige légère est tombée sur les hauteurs et nous fait comprendre qu'il ne faut pas traîner pour relier la côte grecque et profiter, espérons le, encore un peu de la douceur du climat méditerranéen.